Bruno Ruiz
Bruno Ruiz aime étonner autant qu’émouvoir. Avec son dernier spectacle, « Bruno Ruiz peut mieux faire », donné tous les jours à la Cave poésie de Toulouse (à 19h30) jusqu’au 22 février, il déconcerte même. Pas de musique, pas de pianiste pour accompagner le chanteur, qui d’ailleurs ne chante (presque) pas… En revanche, il cause !
Et c’est l’acteur qui se révèle d’emblée, avec cette entrée faussement modeste d’un qui rejoint sa chaise sur la scène en vous racontant sa petite histoire, avec l’accent des brèves de comptoir, de la Ville rose et du quotidien qui ne l’est pas toujours (rose)…
Bref, plus que jamais « poète de music hall », notre Bruno s’affirme artiste de l’oralité en s’assumant dans l’éclectisme. L’autodidacte qu’il est ne se réclame-t-il pas à la fois de Bourvil et de René Char ? Maintenir ensemble le temps d’un spectacle (et d’une vi
e) ces deux manières de faire parler le monde relève de la gageure. Tous les registres de la parole sont donc convoqués, du monologue quasiment inarticulé à la gravité du poème et à la chanson portée a capella, en passant par les jeux de mots, les sketches, la chansonnette, les parodies, les aphorismes, les blagues, les mimiques même… Un grand écart pour ne rien oublier, ou plutôt ne rien renier de ce qui le fait.
On rit beaucoup, bien sûr, mais on chagrine aussi un peu. Les textes qui se succèdent, voire se heurtent, sont de toutes les époques, des paroles de
chansons de ses débuts en 1972, à l’histoire très émouvante, osée tout récemment, des marques noires de chaussures sur le sol laissées par un gosse inhibé car incertain d’avoir sa place quelque part. Bruno se donne rendez-vous avec lui-même en scène. Il se balade sur ses traces, en équilibre sur le fil de ses fidélités, avec pour balancier l’humour et l’émotion, évoquant l’enfance, l’amour, Arcachon ou Toulouse, l’Espagne des républicains de l’exil, la fierté et l’humiliation des pauvres, la parole chaleureuse, le verb
e populaire et la fulgurance du poème.
Certes le poète lyrique tient la bride à la poésie qui ne demanderait qu’à se déployer sur quelque mélodie porteuse, mais c’est pour mieux trouver le chemin du plus grand langage, celui qui ne renie rien de ce qui vous tient debout, du rire aux larmes.
Du 11 au 22 février du mardi au samedi 19h30 sauf les jeudis 21h
. Tarifs : 12 / 10 / 8 euros.